Le yaourt « goût roumain » menace l’économie bulgare
Bien moins cher mais tout aussi balkanique et onctueux, le yaourt « goût roumain » grignote petit à petit des parts de marché sur le yaourt « goût bulgare », déjà mis à mal par le boom du yaourt « à la grecque » et du « petit suisse ». En outre, sa composition sans lait de vache s'intègre parfaitement dans la mouvance montante du "sans lactose". Décryptage.
Depuis les années 50, le yaourt « goût bulgare » est LE pilier de l'industrie bulgare. Que ce soit par vente directe, ou grâce aux royalties sur la fameuse recette, il représente aujourd'hui 46% du P.I.B. bulgare (jusqu'à 78% dans les années 70). Mais aujourd'hui, ce pilier est une épée de Damoclès aux pieds d'argile.
« Nous demandons à Bruxelles d'interdire yaourt goût roumain. Si Bulgarie tombe, c'est toute Europe qui est menacée, comme dominos cascade » a solennellement déclaré le ministre de l'économie Traïtcho Traïkov en français devant les économistes de l'UE.
A Sofia, où la moitié de la ville est occupée par des usines à yaourt, on s'inquiète. « En Bulgarie, on sait faire yaourt. Pas voitures ou téléphones, juste yaourts. Si Roumanie fait yaourt moins chers, nous mourir » résumait cette ouvrière mélangeuse dans une usine à yaourt du cœur de Sofia.
A Bucarest, plaque tournante du "goût roumain", on évoque « la liberté de concurrence » et la nécessité d'innover pour survivre. Ainsi, le patron de "Dairy Goat Corporation", principal exportateur de produits au goût roumain (yaourts mais aussi produits cosmétiques ou préservatifs) a déclaré sur la chaîne d'information économique du pays :
« Le monde en a assez du goût bulgare. Le siècle qui commence aura le goût roumain ».
Selon un économiste de l'OCDE, la solution gagnante pour l'Europe passerait pas la collaboration plutôt que la concurrence. Des négociations sont en cours à Bruxelles pour décider de la création d'un éventuel yaourt« au goût européen ».