Elle fête son départ en retraite mais personne ne l’avait jamais vue

Elle fête son départ en retraite mais personne ne l’avait jamais vue
Renée Cambremer, Responsable du Parc Téléphonie & Minitel, comme l’indique toujours son intitulé officiel de poste dans le système informatique de la préfécture, n’était pas venue travailler depuis le 23 Septembre 1978, date de son embauche où elle était inopinément tombée malade. Entre congés maternités à répétition, congés payés, R.T.T. et congés longue maladie, Renée s’était ainsi faite progressivement oublier de tous. Reportage.

Un courrier automatisé à l’origine de l’affaire

Si la mémoire humaine est faillible, l’ordinateur, lui, n’oublie rien, même 35 plus tard. C’est en allant relever le courrier depuis sa coquette maison d’un quartier paisible de Montesson que Renée découvre une lettre inattendue : “J’avais souvent des trucs de la ‘prèf’.. des relevés, desaugmentations.. des primes.. mais celle-­là elle m’a mise le cul par terre. Ils me disaient que c’était la retraite et qu’une salle était réservée... par l’ordinateur ou je sais pas quoi... pour moi, pour faire un pot le mercredi d’après ! Avec Louis on s’est dit on a rien de prévu ce jour là on va faire un saut, c’est l’occasion ou jamais”.

Surprise à la préfecture

Le jour J, Renée et son concubin Louis se rendent donc en taxi à la préfecture où une porte sécurisée les empêchent bientôt de monter à l’étage indiqué sur le courrier. “La dame disait qu’elle travaillait ici mais moi, je suis dans la maison depuis bientôt 20 ans, je l’avais jamais vue.. et surtout, elle avait pas son badge.” s’étonne Pierre Chevregny, l’agent de sécurité qui le premier découvre le visage bonhomme et serein de l’employée Renée. Après vérification du système informatique et de l’identité de mademoiselle Cambremer, il apparaît de manière formelle à l’agent que Renée travaille effectivement ici : “Ils étaient un peu perdus, alors je les ai emmenés directement en F54, la grande salle des pots”. C’est à une réjouissance à la fois étrange et embarrassante qu’assistent les quelques “collègues” de Renée montés là surtout par curiosité. Priscillia, fonctionnaire de classe B depuis 3 ans commente : “Elle a voulu faire un discours, pour nous dire au revoir, mais c’était beaucoup moins... personnel que d’habitude dans ces occasions là : forcément, elle nous avait jamais vus. Elle a essayé quand même, elle m’a dit que mon sourire lui manquerait, c’était gentil. Elle avait l’air sympa... j’ai même appris, après, que c’était ma boss en fait. C’est incroyable cette histoire”. D’après son responsable hiérarchique officiel, Renée n’a aucun tort et cette situation exceptionnelle n’est dûe qu’à une longue suite ininterrompue “d’incidents incapacitants”. Ce dernier n’a d’ailleurs pas manqué de lui souhaiter une bonne continuation, avant de la remercier et de la raccompagner à son taxi. “C’est sûr je gagnerai moins maintenant mais je vais enfin pouvoir profiter pleinement de la plupart de mes enfants et tous les petits enfants !” concluera-­t-­elle, radieuse, à l’issue de notre rencontre.